Mon métier ? Raconter des histoires. Voici la mienne.
Mon plus lointain souvenir remonte à mes 7 ans. Il s'agit du cadeau que j’ai reçu pour mon anniversaire : un appareil photo.
J’habitais alors dans un pays terriblement photogénique, le Maroc. J’observais autour de moi, l’œil dans le viseur. Mon compagnon argentique encourageait ma curiosité et je découvrais ainsi que les images pouvaient raconter des histoires. Je vivais l’éveil d’une passion qui allait devenir le fondement de ma carrière.
A cette époque j'avais envie de découvrir le monde, de faire des rencontres et de les partager. Alors j’ai promis à mon fidèle partenaire d’être pour toujours « un faiseur d’images » et 7 ans plus tard j’annonçais naturellement à mes parents : « Je veux être journaliste en télévision » !
A 23 ans, mes diplômes audiovisuels en poche, je m'installais à Paris où mon rêve allait prendre forme.
Un stage qui devient mon premier job
J’ai fait mes premiers pas sur l'émission « Perdu de vue » qui était alors un programme phare de TF1, animé par Jacques Pradel (diffusion mensuelle en prime time). Nous aidions des personnes à retrouver un proche disparu et menions des enquêtes à travers le monde pour organiser des retrouvailles.
Mon rôle au sein de cette rédaction était de mettre tous les moyens en œuvre pour retrouver des mineurs en fugue : investigation sur le terrain, reportage auprès des parents et des proches pour comprendre les raisons de la disparition. J'étais à bonne école pour démarrer ma carrière car tous ceux qui faisaient appel à l'émission étaient des êtres fragilisés. Le tact et l'empathie étaient des valeurs essentielles dans l'équipe pour mener à bien notre travail de journaliste. La plupart des mineurs recherchés dans le cadre de ma rubrique étaient retrouvés pendant le direct télévisé. J'ai poursuivi cette tâche pendant 6 ans.
Une nouvelle expérience formatrice
J'ai ensuite intégré l'équipe d'une autre émission de TF1 : "Sans Aucun Doute" (diffusion hebdomadaire à 22h30). J’ai été recruté comme étant « le journaliste spécialiste de l’émotion » selon les propos de Julien Courbet qui souhaitait élargir les thématiques des reportages jusqu'alors essentiellement axés conso. La encore cette expérience a été très formatrice : je réalisais une cinquantaine de reportages par an sur des sujets parfois sensibles comme la violence conjugale, l’adoption ou le racket à l’école, mais aussi des enquêtes (dont la première interview exclusive d’Omar Raddad à sa sortie de prison), j'infiltrais des sectes pour en dénoncer les méthodes, utilisant parfois des caméras cachées pour condamner des comportements abusifs…
Parmi les meilleurs souvenirs de cette époque, il y a une rencontre. En 1998 je tournais en Chine pour filmer l’adoption de Lizi, 8 ans. Une tranche de vie exceptionnelle que j'ai eu la chance de partager et de relater à travers un reportage plein d'humanité. Cette expérience humaine a été si forte que la famille m’a proposé de devenir son parrain. En 2011 pour ses 20 ans Lizi retournait en Chine à la recherche de ses origines, et acceptait que je l'accompagne avec une caméra. Quel bouleversement pour elle comme pour moi !
Très marqué par la puissance de ce témoignage et touché par le destin des personnes adoptées, j’ai continué à approfondir mon travail autour de la thématique de l'abandon, de l'adoption, pendant plusieurs années et à travers des documentaires multiples.
J’ai notamment développé une série documentaire axée autour d’une question simple : comment aider les enfants en difficulté (orphelins, issus de familles pauvres...) ? Je me suis intéressé aux acteurs humanitaires qui font tout pour sauver les enfants du Cambodge, à des volontaires partis dans un orphelinat du Vietnam, aux parrains d'enfants du bout du monde et bien sûr aux adoptants et aux adoptés pour comprendre les enjeux de cet engagement pour la vie...
Premières responsabilités
Trois années après avoir rejoint l'équipe de Sans Aucun Doute, je devenais le rédacteur en chef de l'émission. Responsable de 4 journalistes, j'assurais la préparation de cette émission hebdomadaire (plateaux et reportages) avec pour mission de respecter les délais de production, l’enveloppe budgétaire et le rythme hebdomadaire intensif.
Lorsque l’émission est passée en direct, j’ai eu l’occasion de présenter une rubrique chaque vendredi sur le plateau et de faire des interventions régulières pour présenter mes reportages tel un chroniqueur.
Au début des années 2000 je travaillais en étroite collaboration avec les animateurs les plus populaires de TF1, sur des programmes à forte audience : Jean-Pierre Foucault, Laurence Boccolini, Carole Rousseau. Epanoui en tant que rédacteur en chef, je découvrais aussi une autre fonction, celle de chef de projet : je développais des concepts d’émissions et accompagnais toutes les phases de production jusqu'à la diffusion. Intervenir dès l’origine du programme, le penser, l'argumenter auprès des producteurs et diffuseurs, avant de lui donner vie, a été une véritable révélation.
Coaching outremer
Déterminé à vivre de nouveaux enjeux, je décidais de devenir free lance en 2004. Un statut qui m'a offert une grande liberté de choix, notamment celui de partir aux antipodes pour des missions outremer des plus passionnantes : 4 mois à la Réunion puis 1 an en Nouvelle-Calédonie pour des chaînes du réseau France Télévisions. Ma mission consistait notamment à former des journalistes sur le terrain, à créer de nouveaux programmes, à instaurer une ligne éditoriale et un ton, à insuffler une dynamique créative au sein de ces rédactions.
Ces aventures hors de nos frontières ont encouragé ma curiosité et ma soif de découvertes, initiées par l’appareil photo de mes 7 ans…
Intervenir au niveau international
Pendant mon séjour en Nouvelle Calédonie, j'ai profité de la proximité avec l'Australie pour m'y rendre régulièrement, avant de m'y installer quelques mois. Je voulais que ma pratique de l'anglais franchisse un cap pour acquérir plus de fluidité. Admis dans une école internationale, j'ai suivi des cours préparant à l'examen de la célèbre université anglaise de Cambridge. Et tant pis si j'avais 38 ans et que j'étais le plus vieux des élèves ! Ce break dans ma carrière me semblait indispensable et l'obtention du diplôme "Cambridge Advanced" m'a permis d'atteindre mon but.
Nouveaux horizons
Je suis revenu à Paris après mon escapade Australienne au moment où la TNT faisait son apparition. L'arrivée de ces nouveaux diffuseurs multipliait les chances de créer de nouveaux programmes.
J’ai d'abord vécu cette aventure avec NRJ 12 qui était alors une chaîne en recherche de sa ligne éditoriale. Un de mes documentaires, construit autour de 4 portraits croisés d'individus sur le point de réaliser le rêve de leur vie, a séduit le nouveau directeur des programmes de la chaîne. A tel point qu'il a permis de charter un nouveau programme dont je devenais le rédacteur en chef.
J'ai tout mis en oeuvre pour que ce programme s'installe et contribue au développement de la chaîne. Chez 3e oeil Productions, j'encadrais une équipe de casteurs et de journalistes pigistes en France comme à l'étranger, accompagnais toutes les étapes éditoriales, validais les montages, proposais de nouvelles thématiques à la chaîne, et produisais 15 documentaires de 90' par an dont certains que je réalisais. En quelques mois, Tellement Vrai est devenu le magazine phare de la chaîne grâce à un format innovant, des documentaires rythmés aux thématiques variées : immersion dans des lieux mythiques, portraits de villes emblématiques (Rio, Shanghai ou Sydney), ou d'individus singuliers... J'ai quitté le programme au bout de 4 ans, quand la ligne éditoriale a pris une direction qui ne me correspondait pas.
Transmettre... par la voix
Cependant pendant toute la durée de vie de ce programme, c'est à dire 8 années, j'en ai été le narrateur. Moi qui aime raconter des histoires, j'ai pris ce rôle très à coeur malgré la qualité des reportages très inégale.
Sollicité pour mon expertise
Ma liberté d'exercice me permet de travailler avec plusieurs producteurs en même temps, en tant que consultant. Il arrive que je sois engagé sur des périodes temporaires pour expertiser des documentaires et reportages à la production complexe. Je propose alors des solutions pour reconstruire l'histoire (réécriture, remontage), pour trouver les témoignages manquants, et finaliser le travail jusqu'à la livraison.
Passionnément polyvalent
Malgré certains postes à responsabilités, je n'ai jamais renoncé à la réalisation. Depuis 2011 je me confronte à des styles très variés : portraits de personnalités connues, immersion dans l'univers des Miss pour montrer le faste mais aussi l'envers du décor, découverte d'une destination à travers des lieux et des personnages... Ces dernières années je me suis orienté vers des thématiques plus historiques et patrimoniales. Passionné par tout ce qui touche aux légendes, aux croyances populaires, au fantastique, j'ai pu assouvir cet intérêt à travers mes 3 derniers documentaires consacrés au mythique Saint Graal ou aux histoires étranges liées aux malédictions. Pour certaines de ces réalisations j'ai du tourner des séquences avec des comédiens figurants pour reconstituer des époques variées. Une nouvelle aventure très excitante.
Et maintenant ?
Le statut d'indépendant m'encourage à me remettre sans cesse en question, à suivre l'évolution des moyens de tournage, à prendre en considération les attentes fluctuantes des diffuseurs, à suivre l'état du marché...
Après ces 25 années passées à exploiter des formats multiples, à transmettre des connaissances, à relater des destins extraordinaires et singuliers, j'ai appris à m'adapter à divers publics, à travailler sur des projets ambitieux en équipe ou en télé-travail, à collaborer avec les dirigeants de chaines comme avec de jeunes recrues. De nouveaux défis m'attendent pour les années à venir.
L’appareil photo de mes 7 ans n’a pas fini de m’inspirer.